Eva Lomba-Le Bihan is a neuropsychologist. She has just published an easy-to-access book entitled “ Traumatic Memories ” to help everyone understand their blockages and suffering. She explains that thanks to EMDR, we can heal and find our true personality, freed from our negative beliefs and fears.
France 3: Why this book on “traumatic memories”?
Eva Lomba-Le Bihan: The goal for me was really to disseminate information to a wide audience: that as many people as possible know what trauma is and understand that in fact all suffering is linked to one or more traumas.
What really started this book was a desire to pass on information. It was seeing all these reports on TV, these news items, people who talk about hyperviolent, hyperpainful events. It could be the loss of a child, a rape, school bullying… We see that very often. We come across programs where people tell their painful stories and break down.
And I said to myself, but this is not possible. I am in front of my screen watching this while I have the tools to deprogram this. Where are the people like me who know that we can act? Really, it almost made me angry and especially alerted me. In fact, tools and methods exist to heal.
France 3: Is this resilience?
Eva Lomba-Le Bihan: No, actually. They tell you: you’re going to live with this all your life. You’ll have to deal with it. But not at all! Faced with these people who are suffering and these deterministic responses, I tried to see what I could contribute on my small scale? I reach very few people, ultimately… the people I receive, the people I have around me, but how can I transmit the information more broadly? That’s really what started the book. It has to be known, that there are solutions. We don’t have to live with it. I experience it every day with the patients I see.
France 3: How to heal?
Eva Lomba-Le Bihan: We tend to think that trauma is an assault, an accident, or the loss of a loved one. When in fact, it is much, much broader than that. It is any situation that belongs to the past and that has not been processed correctly by the brain and therefore leaves painful traces in the present. However, because we can treat these traumas, we are not condemned to suffer them indefinitely when they return consciously or unconsciously.
On peut faire ce travail pour déprogrammer les traumatismes en étant accompagné mais aussi en autonomie pour ceux qui en ont envie. C’est pour ça qu’à la fin du livre, je propose des protocoles pour désensibiliser des situations douloureuses.
France 3 : Effectivement c’est didactique, vous donnez des clés pour identifier ses propres traumatismes. Le sous-titre est évocateur : « libérez-vous de votre histoire et reprogrammez votre présent »…
Eva Lomba-Le Bihan : Oui, j’ai vraiment la volonté de donner des clés au lecteur sur la compréhension de lui-même. Les dysfonctionnements, on les connaît. J’ai beaucoup de patients, tous les jours, quand je leur explique comment ça fonctionne, pourquoi ils vivent ce qu’ils vivent dans le présent, à quoi ça se rapporte dans leur histoire de vie, on fait un travail en profondeur, ils comprennent… Tout a un sens, tout a une explication.
La souffrance, en fait, ça se rapporte toujours à des connexions qu’on va faire avec le passé, des connexions douloureuses, ou alors avec des projections anxieuses qu’on va avoir sur le futur.
France 3 : Vous pratiquez l’EMDR (Intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires). Vous pouvez expliquer comment cette méthode fonctionne ?
Eva Lomba-Le Bihan : Quand on vit un événement douloureux, le cerveau est censé effectuer ce fameux traitement de l’information qui permet de donner du sens à ce qu’on vit, de créer du lien entre l’événement, même s’il est douloureux, et toute notre histoire de vie. On est censé pouvoir évacuer les émotions douloureuses, apaiser le corps, éloigner les pensées négatives et avancer sans que cet événement n’ait d’impact sur nous.
Normalement, le cerveau est capable de ça. Sauf que, quand la situation est trop violente, il y a trop de décharge émotionnelle ou alors quand c’est une situation à répétition pendant plusieurs années, ou quelque chose à quoi on ne s’attend pas du tout… Dans ce type de situations, il arrive que le cerveau ne traite pas correctement les informations.
Donc, les informations négatives qui vont être intégrées à ce moment-là, en termes de pensées, émotions et sensations corporelles vont se cristalliser. Par exemple, les pensées « je suis nul », « je n’ai pas de valeur », « je suis coupable », les émotions négatives qu’on connaît, peur, tristesse, colère, etc. Pour le corps, ça peut être une boule d’angoisse, la gorge serrée, le mal au ventre. Si le cerveau ne fait pas ce travail-là, ça va se répéter. Les années vont passer, ça va rester ancré. Les croyances négatives vont rester ancrées. Les émotions négatives, les sensations physiques vont se répéter.
France 3 : Le fait de fixer un point de gauche à droite peut vraiment permettre au cerveau de se reprogrammer ?
Eva Lomba-Le Bihan : Avec l’EMDR, effectivement, il va y avoir une stimulation. C’est vraiment basé là-dessus. Une stimulation bilatérale alternée. Donc, ça veut dire un mouvement de stimulation de gauche à droite en continu. Ça peut être soit en bougeant les yeux de gauche à droite en suivant une baguette par exemple ou en tapotant sur les genoux à gauche puis à droite en alternance. Ça peut être aussi sur les épaules. On peut se le faire à soi-même pour apaiser les émotions. Donc on va l’activer pendant la séance tout en pensant à l’événement qu’on veut retraiter.
On laisse le cerveau faire lui-même ses connexions. On va avoir des pensées qui vont défiler. Parfois, il y aura des choses totalement inconscientes aussi. On peut avoir des sensations physiques, des émotions qui remontent. Et on laisse faire ce processus naturel. Physiologiquement, l’amygdale va pouvoir s’apaiser. C’est neutre, on y pense, mais il ne se passe plus grand-chose au niveau émotionnel. On se rappelle de ce qui s’est passé mais on n’a ni la décharge émotionnelle, ni les croyances négatives qui étaient associées à l’événement. Le trauma est passé et c’est définitif.
L’amygdale fait partie du système limbique communément appelé « cerveau émotionnel » : ce système est constitué d’un ensemble de structures cérébrales qui jouent un rôle majeur dans la valeur émotionnelle attribuée aux évènements. Et dans les réactions et comportements associés. En cas de traumatisme, l’amygdale est en suractivation et ne remplit plus sa fonction protectrice. Elle amène la personne à une hypersensibilité émotionnelle inadaptée au contexte. Cela peut entraîner des troubles dépressifs, phobiques ou d’autres symptômes.
France 3 : Vous donnez dans votre livre des exemples très concrets de patients qui sont complètement sortis de leurs peurs, leurs blocages, leurs inhibitions ou leurs colères…
Eva Lomba-Le Bihan : Oui je parle de personnes qui viennent me voir parce qu’elles se sentent surmenées au travail, par exemple. Elles sont proches du burn-out. D’autres manquent de confiance en elles. C’est quelque chose qu’on retrouve beaucoup, le manque d’estime de soi. Les gens qui se disent « je suis nul », « je n’ai pas de valeur ». Je crois que c’est la majorité de mes patients.
Il y a des gens qui viennent pour des douleurs physiques au départ, pour des maux de tête, par exemple, des migraines. Il y a des gens qui viennent aussi pour des problèmes de poids. Bien sûr, on va aller rechercher sur les traumas qui peuvent être en lien. Je parle de personnes qui ont vécu du harcèlement, des abus sexuels. Il y en a beaucoup malheureusement.
Ça peut être au sein de la famille, ça peut être ailleurs. Il y a beaucoup d’exemples parentaux aussi. Ça peut être bien de parler de ça, parce que ça casse un peu l’image du traumatisme agression, accident, etc. Parfois, il y a des personnes qui vont développer un perfectionnisme pesant, qui vont se mettre la pression, qui vont avoir l’impression qu’ils n’en font jamais assez, qui vont manquer d’estime d’elles-mêmes à cause de la pression parentale.
Des parents qui étaient très exigeants, qui en attendaient toujours plus, qui n’étaient jamais satisfaits, qui ne valorisaient jamais et qui pointaient toujours ce qui n’allait pas. Le jeune qui a 16-17 de moyenne, à qui le parent répond qu’il aurait pu avoir 19, qu’il aurait pu avoir 20. Ça paraît tout bête comme ça, mais en fait, ça fait des dégâts. Moi, je le vois en séance, ça fait des dégâts chez l’adulte ensuite. Et ça peut justement provoquer un surinvestissement au travail voire un burn-out.
France 3 : Pensez-vous qu’on peut tout guérir ?
Eva Lomba-Le Bihan : Oui. Ce qui est frappant, c’est le contraste entre la personne que je reçois au début, l’état dans lequel elle arrive, et à la fin de la thérapie ou au bout de plusieurs séances, la personne que j’ai face à moi. J’ai l’impression d’avoir deux individus totalement différents. Avec une personnalité carrément différente.
Quelqu’un qui va arriver avec beaucoup d’insécurité, qui va avoir peur de tout, s’inquiéter pour tout,
être en hypervigilance, et qui, finalement, à la fin, sera quelqu’un de très sécure, très confiant, très compétent. Le contraste entre les deux est assez impressionnant. Il va peut-être changer de cercle d’amis. Il y a des personnes de son entourage qui vont s’éloigner, d’autres qui vont arriver. C’est possible qu’il y ait une rupture amoureuse, aussi. C’est possible qu’il change de travail.
For example, I had a patient who was really, really insecure about money. We dealt with the traumas of her history concerning money, social deprivation, the difficulties her parents had making ends meet, the various experiences where she was really in need, where she had to go and get food parcels, go and see social workers. There was a whole very heavy past.
And by dealing with these traumas, she began to find more security within herself. She was able to sixteen opportunities that she would not have seized before out of fear. With therapy, she made the insecurity disappear from her mind. She moved to a new region, bought a small house facing the sea. She went towards the job of her dreams and it’s working well for her today. It’s quite impressive to see how things present themselves in matter, depending on what we believe in.
France 3: Is this a renewed integrity?
Eva Lomba-Le Bihan: Yes. We can say that we lose a part of ourselves somewhere because it is this conditioning by trauma. It can be family, it can be education, it can be traumatic events outside the home, but we lose a part of ourselves, in fact. We lose our self-confidence, we lose our very being, our true self. We lose the connection to what we really want to do, to what we really love.
There are people who don’t even know what they want anymore. They tell me: I don’t know what I want anymore, what I’m passionate about, what I want to go towards. I can’t connect to that anymore. Because, for example, the traumas experienced were parents who weren’t listening to the child’s emotions. The child expresses emotions, expresses desires, wishes spontaneously when he is very young.
It’s natural to listen to what we like, what we want, to make requests. It’s natural and spontaneous. But if it’s not heard, if it’s not welcomed, if he even suffers humiliation, the child will stop expressing himself. I have cases like that. Many.
When we repair, when we deprogram this kind of trauma, the person little by little begins to reconnect with who they are, with what they really want, with what they love, since we remove the fear, the fear of judgment, the fear of humiliation, the fear of not being heard. We can remove fear, insecurity, anger, sadness. We can heal yes. From everything I believe!